L’exposition explore l’ambivalente fascination qu’exerce sur nous la tourmente des éléments. Cette « passion mêlée de terreur et de surprise » , cristallisée par le philosophe Edmund Burke en 1757 en un mot, le « Sublime », exprime ce mélange d’attraction et de répulsion éprouvé par l’homme face aux manifestations déchaînées de la nature, le sentiment de sidération, de solitude, de toute-puissance et de terreur mêlées face à son immensité. Ainsi, l’océan démonté sous la tempête, le réveil du volcan, les escarpements immaculés et les vallées sombres deviennent au XVIIIe siècle les stéréotypes de ce sublime largement représenté dans la littérature et la peinture romantiques.
À travers près de 300 œuvres, films et documents, complétés par les fonds de musées internationaux – Arts Council, British Museum, Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, le Fonds Maurice & Katia Krafft, Cinémathèque Française, BNF, Nevada Art Museum, Museum of Modern Art, New York... –, l’exposition interrogera de façon inédite le renouveau de cette notion de sublime dans un contexte contemporain et ses filiations avec le XVIIIe siècle, en rassemblant les œuvres d’une centaine d’artistes
du monde entier, de Léonard de Vinci à Richard Misrach en passant par William Turner, Agnes Denes et Lars von Trier.
L’exposition révèle la persistance de notre fascination pour la « nature trop loin », selon l’expression de Victor Hugo, et la continuité d’une iconographie du Sublime.
Elle s’attache également à montrer comment, dans cette persistance, s’inscrivent deux mutations radicales : celle de la position du spectateur des débordements du monde, prenant conscience de son rôle d’acteur, et celle de l’idée même de catastrophe. Les catastrophes naturelles récentes (tsunamis, cyclones, séismes), amplifiées par leur impact sur des sites habités, industriels ou urbains, ont aiguisé la conscience d’un équilibre fragile, d’une maîtrise toute relative de l’environnement par l’homme et des effets de ses activités sur la nature. Elles ont attisé le sentiment d’une urgence paralysante, excédant la seule délectation esthétique. Depuis Tchernobyl, Katrina, Fukushima, nous sommes à nu, acteurs partiels, et individus au cœur d’un possible désastre à venir. L’exposition s’ouvrira sur une géographie du terrible et de la peur à travers des pièces jouant sur l’ambigüité de paysages contemplatifs ou idéalisés, aux stigmates invisibles.
Enfin, l’exposition évoque l’apparition depuis les années 1960-1970 d’une relation renouvelée à la nature passant par le réenchantement, une aspiration à une fusion avec les éléments d’une part, et à l’éveil d’une conscience écologique d’autre part, s’exprimant tant sur le terrain poétique que via le politique et renouant, là encore, consciemment, avec une certaine iconographie du sublime romantique. Elle s’appuie notamment sur la génération des artistes de l’Earth art et du Land art qui interagirent directement avec le paysage et les éléments en réalisant des interventions ou performances in situ.
Des contrepoints historiques, scientifiques et cinématographiques (revues, fonds d’archives, documents de sociétés de géographie ou de vulcanologues) viendront compléter le parcours, en vue d’esquisser une généalogie non linéaire de ces tremblements du monde.
Catalogue
Commissariat :
Hélène Guenin, responsable du pôle Programmation au Centre Pompidou-Metz
Assistée par Hélène Meisel, chargée de recherches au Pôle Programmation, Centre Pompidou-Metz